PARIS-B est heureuse de présenter son group-show de l’été, Une vie à l’opéra, avec une sélection de onze artistes à partir du 30 juin. S’appuyant sur l’essai sociologique d’Erving Goffman, l’exposition illustre les notions de mise en scène et d’identité.
Ainsi, le spectacle va commencer face au public patiemment assis. Entre silence, concentration et répétitions furtives, l’acteur rentre dans son personnage et n’en sortira peut-être jamais, abandonnant ses spectateurs et basculant dans l’illusion.
Ouvrant sur la toile Une Nuit à L’opéra de Dorian Cohen, nous vous invitons à prendre place dans la salle. Le spectacle va commencer face à un public patiemment installé. Entre silence, concentration et répétitions furtives, l’acteur entre dans son personnage. Jouer, faire semblant, imiter, mettre en scène, d’après Socrate, le genre théâtral serait le plus proche de la vie réelle. Ainsi, par notre imagination et nos scénarios, nous nous mettons à romancer notre vie. À espérer pouvoir s’en tenir au script de nos fantasmes et à mettre en scène nos élans, parfois de confrontations, parfois amoureux, nous mettons en œuvre un moment que l’on aurait pré-écrit. Des sérénades chantées en bas du balcon de l’être aimé, aux moments plus intimes où nous feignons d’incarner un personnage représentant la séduction telle la Vénus de Marion Bataillard, nous jouons tous des rôles occasionnellement. Mais il arrive que nous subissions cette mise en scène, orchestrée à nos dépens comme l’illustre Perp Walk de Léa Belooussovitch. Ainsi l’acteur peut émerger de la foule pour monter sur les planches. Tout cela est amené par des modèles de représentations qui nous font miroiter un idéal. À l’instar de nos romans préférés, les personnalités publiques influencent nos actes et nous oublions que ces derniers sont avant tout fictifs ou surjoués. Les œuvres de Lucia Tallová nous rappellent ainsi nos murs recouverts de posters des idoles auxquelles nous nous identifiions lorsque nous étions dans la période cruciale du développement de notre personnalité, tandis que Paradoxe de Hervé Priou suggère les lectures qui ont imprégné nos fantasmes. Il est effectivement tentant de devenir ou s’imprégner de ces figures de représentation à part entière. De temps à autre, l’acteur que nous créons s’immisce dans le public et se fond dans la masse, parfois, il s’échappe de la scène. Les rideaux ne tombent pas devant celui qui continue son rôle après avoir fermé la porte derrière lui, jouant alors devant un public invisible fantasmé par l’individu. Rappelant que le mot «personne» signifie étymologiquement «masque», E. Goffman pense que nous sommes perpétuellement dans la représentation. Il décrit un monde utopique où chaque acteur ne possède qu’un masque unique représentant son véritable soi. Woman and dark figure de Fu Site illustre ainsi ce masque créé par les interactions sociales qui ont des effets de longue portée. D’après E. Goffman, chaque représentation participe à la légitimation du faux rôle que l’on se donne. Les masques que nous portons peuvent cependant
échapper à notre contrôle. Dans l’iconographie symbolique, la forêt représente ces moments de doute et de recherche de soi, l’œuvre de Zhu Xinyu évoque sombrement ce moment qui peut être critique dans le rapport que nous entretenons avec nous-même. En incorporant ces masques, nous arrêtons de jouer les rôles qui finissent par nous définir entièrement. Ainsi, nous perdons pied, basculons dans l’illusion et
devenons des ersatz de nous-même. L’acteur n’est alors plus sur scène.